Israël accuse le Hamas de remettre en cause le fragile accord de cessez-le-feu à Gaza
Israël a accusé jeudi le Hamas de reculer sur l'accord annoncé la veille pour une trêve à Gaza et la libération des otages, et mené de nouvelles frappes sur le territoire palestinien, avant une réunion gouvernementale pour approuver cette issue à une guerre de plus de 15 mois.
Dans la dernière ligne droite, les autorités israéliennes ont dit jeudi matin attendre des garanties des pays médiateurs que le Hamas "a accepté tous les éléments de l'accord".
L'accord prévoit dans une première phase une trêve à partir de dimanche, la libération de 33 otages israéliens en échange d'un millier de prisonniers palestiniens, et une augmentation de l'aide humanitaire.
Selon le bureau du Premier ministre Benjamin Netanyahu, le mouvement islamiste palestinien est revenu "sur certains points" pour "extorquer des concessions de dernière minute". Un haut dirigeant du Hamas, Sami Abou Zouhri, a rejeté ces accusations, assurant que le mouvement s'en tenait à l'accord.
Dans le même temps, Israël a poursuivi ses frappes sur la bande de Gaza, selon la Défense civile du territoire, qui a fait état de 73 personnes tuées depuis l'annonce de l'accord mercredi soir, dans une "forte intensification" des bombardements.
"Nous attendions la trêve et nous étions heureux" mais "soudain nous avons reçu la nouvelle du martyre de 40 personnes", témoigne à Jabalia, dans le nord du territoire palestinien, un proche de victimes, Saeed Alloush.
"Nous avons un peu peur (...) que l'accord tombe à l'eau, mais nous restons positifs", réagit pour sa part à Tel-Aviv Yulia Kedem, où lampadaires et bancs publics sont recouverts d'autocollants saluant la mémoire de soldats tués ou d'otages .
L'annonce de l'accord par le Qatar et les Etats-Unis - pays médiateurs avec l'Egypte - a été rendue possible par une accélération des négociations, qui piétinaient depuis un an, à l'approche du départ de la Maison Blanche de Joe Biden, remplacé lundi par Donald Trump.
La nouvelle a été saluée par de nombreuses capitales et organisations internationales. Et des milliers de Palestiniens ont exulté à travers la bande de Gaza assiégée et dévastée par la guerre déclenchée par l'attaque d'une ampleur sans précédent du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023.
Le Hamas a vu dans l'accord le fruit de la "ténacité" du peuple palestinien et de sa "vaillante résistance". Le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, dont le pays soutient du Hamas, a jugé que la "résistance" palestinienne avait "vaincu" Israël.
- "Bon choix" -
Si le président israélien Isaac Herzog a salué un "bon choix", le ministre des Finances Bezalel Smotrich, d'extrême droite, a dénoncé un accord "dangereux" et précisé que les ministres de son parti voteraient contre.
L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.210 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles. Sur 251 personnes enlevées le jour de l'attaque, 94 sont toujours retenues à Gaza, dont 34 sont mortes selon l'armée.
Les principaux éléments de l'accord ont été rendus publics par le Premier ministre du Qatar, Mohammed ben Abdelrahmane Al-Thani et Joe Biden.
Il doit entrer en vigueur dimanche pour une première phase de six semaines comprenant un cessez-le-feu, la libération de 33 otages - sur un total de 94 toujours détenus à Gaza, dont 34 déclarés morts par l'armée - et un retrait israélien des zones densément peuplées.
La deuxième phase doit permettre la libération des derniers otages et un retrait complet israélien de Gaza, a dit M. Biden. La troisième et dernière étape doit être consacrée à la reconstruction de Gaza et à la restitution des corps des otages morts en captivité.
"Un mécanisme de suivi (...) sera mis en place au Caire géré par l'Egypte, le Qatar et les Etats-Unis", selon le Premier ministre du Qatar.
Joe Biden a assuré que l'accord permettrait, dès sa première phase, un cessez-le-feu "entier et total".
L'aide humanitaire doit augmenter pendant la première phase, durant laquelle sera négociée les modalités de la deuxième phase, à savoir "une fin définitive de la guerre", a-t-il ajouté.
- L'après-guerre en suspens -
Déjà minée par un blocus israélien imposé depuis 2007, la pauvreté et le chômage, la bande de Gaza assiégée a été ravagée par la guerre et la grande majorité de ses 2,4 millions d'habitants ont été déplacés et vivent dans des conditions particulièrement dures.
"Je n'arrive pas à croire que ce cauchemar (...) commence à toucher à sa fin", a déclaré à l'AFP Randa Samih, une déplacée de 45 ans dans le camp de Nousseirat (centre).
L'Union européenne a annoncé jeudi l'octroi une aide humanitaire de 120 millions d'euros pour faire face à la "situation catastrophique" dans le territoire palestinien.
S'il réussit à faire taire les armes, le cessez-le-feu laisse en suspens l'avenir politique du territoire où le Hamas, à présent très affaibli, a pris le pouvoir en 2007.
(A.Johnson--TAG)