Canada: le Premier ministre Justin Trudeau démissionne après neuf années au pouvoir
Le Premier ministre canadien Justin Trudeau, au plus bas dans les sondages, a annoncé lundi sa démission après des semaines de crise politique dans le pays, aggravée récemment par les menaces économiques de Donald Trump.
Près de dix ans après son arrivée au pouvoir, Justin Trudeau, 53 ans, était sous pression de l'opposition mais aussi de nombreuses personnalités de son parti, inquiètes pour les élections législatives qui se profilent.
"J'ai l'intention de démissionner de mon poste de chef du parti et de Premier ministre une fois que le parti aura choisi son prochain chef", a-t-il déclaré dans la capitale Ottawa devant la presse, visiblement ému.
Le prochain chef du parti libéral (centre-gauche) deviendra dans la foulée automatiquement le nouveau Premier ministre canadien et pendant ce temps, le Parlement est suspendu jusqu'au 24 mars.
Le processus de sélection d'un nouveau chef prend généralement plusieurs mois ce qui signifie que M. Trudeau devrait donc être encore Premier ministre le 20 janvier, lorsque Donald Trump prendra ses fonctions.
Peu après l'annonce de la démission de Justin Trudeau, le président élu américain a estimé que le Canada devrait "fusionner" avec les Etats-Unis, une remarque qu'il a faite à plusieurs reprises ces derniers temps.
Tandis que la Maison Blanche a salué un "ami fidèle des Etats-Unis".
- Chaos -
Dans le pays personne ne semble vraiment surpris: "j'ai l'impression que c'est un peu un soulagement pour lui parce qu'il avait beaucoup de pression sur les épaules", estime auprès de l'AFP Annette Sousa, habitante d'Ottawa.
Rob Gwett de Toronto, aurait préféré que Justin Trudeau "déclenche des élections" et juge qu'il aurait dû partir il y a déjà longtemps "à cause des scandales".
S'il avait fait souffler un vent d'espoir en arrivant au pouvoir, Justin Trudeau souffre aujourd'hui d'une faible cote de popularité, étant vu comme responsable notamment de la forte inflation mais aussi de la crise du logement et des services publics.
Et dans ce contexte tendu, les déclarations de Donald Trump après son élection sont venues mettre de l'huile sur le feu: le républicain veut imposer des droits de douane de 25% à ses voisins dès son retour au pouvoir.
Une menace qui a provoqué des tensions et a abouti mi-décembre à la démission de la vice-Première ministre, Chrystia Freeland, sur son fond de désaccord avec Justin Trudeau sur la façon de gérer ce dossier.
Le contexte politique actuel est "hautement inhabituel" avec un changement de chef à seulement quelques mois d'une élection, a commenté auprès de l'AFP Lori Turnbull, professeure à l'Université Dalhousie.
De nombreux défis attendent son successeur de M. Trudeau, estiment les experts puisque les libéraux accusent un retard de plus de 20 points dans les sondages face aux conservateurs avec des législatives prévues au plus tard en octobre 2025.
"C'est une cause perdue", lâche André Lamoureux, spécialiste en science politique à l'Université du Québec à Montréal (UQAM). "Personne n'est en position aujourd'hui au Parti libéral de recréer un engouement, un mouvement d'adhésion".
- "Soulagement" -
Les libéraux "veulent tromper les électeurs en mettant un autre visage pour continuer à arnaquer les Canadiens", a dénoncé sur X Pierre Poilievre, le chef des conservateurs.
Fils aîné d'un ex-Premier ministre charismatique, Justin Trudeau avait fait une entrée fracassante sur le devant de la scène politique et rapidement acquis une renommée mondiale, après avoir longtemps cherché sa voie: boxeur amateur, moniteur de snowboard, professeur d'anglais et de français...
Perçu à ses débuts comme un Premier ministre moderne, féministe, progressiste, soucieux des enjeux environnementaux et déclenchant à son tour une "Trudeaumania", il a signé lors du premier mandat de Donald Trump a un nouvel accord avec le Mexique et les Etats-Unis.
Mais aussi fait du Canada le deuxième pays au monde à légaliser le cannabis, instauré l'aide médicale à mourir, une taxe carbone et fortement investi dans les programmes sociaux lors de ces trois mandats.
(T.Martin--TAG)