En Moldavie, la présidente proeuropéenne Maia Sandu en tête
Deux semaines après la victoire sur le fil du "oui" au référendum sur l'UE en Moldavie, la présidente pro-européenne Maia Sandu est bien partie pour l'emporter dimanche au second tour d'une présidentielle marquée par des accusations d'ingérences russes.
Après le dépouillement de 95% des bulletins, la candidate de 52 ans a recueilli 51,6% des voix, contre 48,3% pour Alexandr Stoianoglo, ex-procureur de 57 ans soutenu par les socialistes prorusses, selon les résultats publiés par la Commission électorale.
Si M. Stoianoglo a mené dans un premier temps, la tendance s'est inversée dans la soirée au fur et à mesure du comptage des voix.
Maia Sandu a remercié "tous ceux qui ont cru à la démocratie", en s'adressant à ses partisans réunis dans une ambiance survoltée au quartier général de campagne dans la capitale Chisinau.
Son rival avait appelé un peu plus tôt "au calme, quels que soient les résultats finaux".
Comme en Géorgie, autre ex-république soviétique, la Russie a été accusée d'ingérence dans le processus électoral, des allégations catégoriquement rejetées par le Kremlin.
Tout au long de la journée, les autorités ont fait état "de provocations et de tentatives de déstabilisation".
La police a dit enquêter sur la mise en place présumée par la Russie de "transports organisés" vers le Bélarus, l'Azerbaïdjan et la Turquie pour permettre aux électeurs résidant sur son sol d'aller voter dans les consulats ou ambassades moldaves de ces pays. Des cyberattaques et de fausses alertes à la bombe ont également visé les opérations de vote à l'étranger, selon la même source.
- "Contre les escrocs" -
Première femme à occuper en 2020 les plus hautes fonctions dans cette ex-république soviétique située entre l'Otan et la sphère d'influence russe, Maia Sandu a tourné le dos à Vladimir Poutine après l'invasion russe de l'Ukraine voisine.
Elle était arrivée largement en tête du premier tour le 20 octobre mais son rival a pu compter sur le soutien de plusieurs petits candidats pour resserrer l'écart.
Le taux de participation a été nettement plus élevé dimanche qu'au premier tour, avec un nombre record de votants dans la diaspora majoritairement favorable à la présidente sortante.
Dans l'entre-deux tours, elle avait intensifié sa campagne sur les réseaux sociaux et dans les villages pour tenter de contrer les achats de vote massifs qui ont, d'après Chisinau, faussé les résultats du référendum du 20 octobre, plus disputé que prévu (50,35% pour le "oui").
Après avoir glissé son bulletin dans l'urne, Maia Sandu avait appelé à se mobiliser "contre les escrocs", plaçant sa "confiance" dans ses concitoyens "qui ont toujours fait avancer le pays et l'ont protégé du mal".
En face, Alexandr Stoianoglo, discours lisse où les mots russes se mêlent souvent à la langue officielle roumaine, a nié "avoir des liens avec le Kremlin" et toute implication "dans des fraudes électorales".
Venu voter avec sa femme et ses deux filles, il a défendu "une Moldavie qui ne demande pas l'aumône mais développe des relations harmonieuses avec à la fois l'Est et l'Ouest".
- "Au prix fort" -
Ce pays pauvre, sous perfusion européenne, est extrêmement polarisé, entre d'un côté une diaspora et une capitale majoritairement favorables à une intégration dans l'UE, et de l'autre les zones rurales et deux régions, la province séparatiste de Transdniestrie et la Gagaouzie autonome, tournées vers la Russie.
Natalia Grajdeanu, organisatrice de mariages de 45 ans, a fait le voyage d'Irlande où elle vit. "Nous sommes un petit pays avec un grand cœur et nous voulons que l'Europe soit notre maison", a-t-elle dit à l'AFP.
Mais d'autres, comme Grigore Gritcan, retraité originaire de Transdniestrie, sont réticents. Il plaide pour "plus de liberté et une vraie paix", alors qu'actuellement "les gens n'ont rien à manger et pas de travail".
Le scrutin est suivi de près de Bruxelles à Washington, où l'on s'inquiète de la tentative russe de perturber le processus électoral.
La Moldavie "paie au prix fort" sa décision de couper les ponts avec Moscou, souligne l'expert de WatchDog. "La pression est sans précédent et l'argent déboursé pour mener ces activités de déstabilisation colossal", dit-il, évoquant un investissement total de plus de cent millions de dollars.
Avec un objectif: faire revenir le pays "dans l'orbite de la Russie".
(C.Young--TAG)