Prochains jours chamboulés au Parlement par l'invasion de l'Ukraine
"La séance est levée": après cinq années remuantes, les travaux législatifs s'achèvent jeudi à l'Assemblée nationale à l'approche des échéances électorales, mais l'invasion en cours de l'Ukraine par la Russie bouscule les prochains jours au Parlement.
Un "message" d'Emmanuel Macron sur cette crise sera lu dès vendredi à 14H30 devant l'Assemblée et le Sénat par leurs présidents Richard Ferrand (LREM) et Gérard Larcher (LR), selon une procédure de la Constitution utilisée lors de circonstances exceptionnelles.
Un "comité de liaison parlementaire" réunira ensuite à 16H30 à Matignon les chefs de file des groupes parlementaires, les présidents des deux chambres et la ministre des Armées notamment.
Et dès mardi 1er mars devant les assemblées, un débat doit se tenir avec le gouvernement, sur le fondement de l'article 50-1 de la Loi fondamentale, selon plusieurs sources parlementaires. Il était vivement réclamé par les oppositions.
"Les évènements de cette nuit sont un tournant dans l’Histoire de l’Europe et de notre pays", a estimé jeudi le chef de l'Etat lors d'une allocution, promettant de répondre "sans faiblesse" à la Russie, avec l'UE et l'Otan.
Les nouvelles d'Ukraine ont ébranlé jeudi les députés, qui s'apprêtaient à plier bagage après leurs dernières séances.
Le premier débat, sur la situation sanitaire du Covid-19, est paru "un peu décalé par rapport à la situation qui nous préoccupe tous", a reconnu le ministre de la Santé Olivier Véran.
Le chef de file des députés LREM, Christophe Castaner, a condamné la "tentative d'hégémonisme" du président russe Vladimir Poutine qui "viole les droits internationaux".
"Rappelons que nos faiblesses d'aujourd'hui peuvent être nos fautes de demain", a lancé dans l'hémicycle Philippe Gosselin (LR) dans une référence historique à la situation du Vieux continent à l'aube de la Seconde Guerre Mondiale. Il a appelé à ce que "la France soit à la pointe de la mobilisation".
- "préserver nos démocraties" -
Il ne faut "surtout pas entrer dans l'escalade", a jugé Mathilde Panot, présidente des députés Insoumis. Elle a été prise à partie par des députés de la majorité qui reprochent au candidat LFI à l'Elysée Jean-Luc Mélenchon une position jugée complaisante à l'égard de Moscou.
"Nous serons aux côtés des forces de paix", a assuré le communiste Jean-Paul Lecoq. "Jacques Prévert disait: +Quelle connerie, la guerre+".
Très ému, le député des Français d'Europe de l'Est Frédéric Petit (MoDem) a dit avoir été en contact dans la nuit avec notamment l'école française d'Odessa en Ukraine. Le président russe fait selon lui "une déclaration de guerre culturelle, c'est l'anti-Europe".
"Nous sommes tous saisis par une forme de stupéfaction et d'inquiétude", confiait dans les couloirs l'ancien patron des députés LREM, Gilles Le Gendre. "Pour les responsables politiques, il y a une seule ligne: sang-froid et unité même en période électorale", plaidait l'élu de Paris.
Lors de l'adoption définitive de la proposition de loi pour "démocratiser le sport" dans l'après-midi, la ministre Roxana Maracineanu, originaire de Roumanie, a souligné la "dimension particulière" du texte en ce jour: "préserver nos démocraties partout et là où on peut, c’est apporter à son échelle une petite pierre à un édifice que l’on doit protéger".
Les messages "Stop War" ou "Stand with Ukraine" ont fleuri sur les comptes Twitter de nombre de parlementaires.
"Je suis inquiet des conséquences de la guerre (...) sur notre pays et le quotidien des Français: hausse des prix du gaz et des prix des carburants", songe François Jolivet (LREM), qui veut "réfléchir à des mesures de protection fiscale exceptionnelles".
Le Parlement peut être reconvoqué à tout moment dans les prochaines semaines, sans attendre le 28 juin, jour de l'ouverture de la XVIe législature à l'Assemblée nationale, après l'élection de 577 députés les 12 et 19 juin.
Un député LREM vient cependant de remettre sa démission, effective lundi, a annoncé le président de séance. Il s'agit de Mickaël Nogal, qui devient N.2 de l'association nationale des industries alimentaires (Ania), répertorié comme un lobby.
Nommé à la tête du plan France 2030, son collègue LREM Bruno Bonnell avait raccroché dès le 29 janvier.
(L.Kaufmann--BBZ)