Encore aucun compromis dévoilé à la COP29 un jour avant la fin
En public, pays riches et en développement ne sont pas plus proches d'un accord jeudi à la conférence climatique COP29 à Bakou après la publication d'un projet qualifié de "caricature" ou d'"insulte", mais les vraies négociations se poursuivent en coulisses pour forger le compromis final d'ici vendredi.
"Cela avance, il est évident que ce texte n'est pas final. Ce sera radicalement différent, il y a de l'espace pour un accord", a confié à l'AFP le ministre irlandais Eamon Ryan, à la sortie de la réunion de coordination des ministres de l'Union européenne jeudi matin, au cours de laquelle ils ont discuté de leur stratégie.
L'UE est au centre du jeu à la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP29), en tant que premier contributeur mondial à la finance climatique, et grâce aux lignes de communication qu'elle entretient avec à la fois la Chine et les pays vulnérables, notamment les petits Etats insulaires.
Un texte provisoire de 10 pages a été publié par la présidence azerbaïdjanaise de la COP29 au petit matin, tentant de résumer les positions sur le nouvel objectif d'aide financière que la conférence est censée fixer. Et force est de constater qu'elles sont encore très éloignées, du moins sur le papier.
Le texte n'indique que des "X" à la place des montants, même si ceux-ci s'expriment en "milliers de milliards".
"Le texte caricature les positions des pays développés et en développement", estime Joe Thwaites, de l'ONG NRDC. "La présidence doit proposer une troisième option pour les concilier."
L'absence de chiffrage pour les pays riches "est une insulte aux millions de gens sur le front du changement climatique", a réagi Jasper Inventor, chef de la délégation de Greenpeace International à Bakou.
Le Kényan Ali Mohamed, qui représente les pays africains, insiste sur cette absence de chiffrage: "Nous avons besoin que les pays développés s'engagent urgemment sur ce point."
Mais "tout le monde travaille sur un accord", confie un vétéran des négociations.
Aux COP, personne ne dévoile ses vraies lignes rouges jusqu'au dernier jour.
Les pays développés fournissent aujourd'hui une centaine de milliards de dollars d'aide financière aux pays en développement pour qu'ils s'adaptent au changement climatique et investissent dans les énergies bas carbone. La COP29 doit fixer un nouvel objectif d'aide jusqu'à 2030 ou 2035.
La conférence doit se terminer vendredi soir, mais rares sont les COP à s'être conclues à l'heure.
- Des milliers de milliards -
La première option du texte publié jeudi reflète les exigences des pays en développement. Sans s'avancer sur un chiffre précis, elle demande que "X" milliers de milliards de dollars par an soient fournis par l'argent public des pays riches actuellement obligés de contribuer selon les textes onusiens - essentiellement Europe, Etats-Unis et Japon - et par des fonds privés associés, "sur la période 2025-2035", et essentiellement sous forme de dons, plutôt que de prêts.
Soit bien plus que les 100 milliards que les pays riches s'étaient engagés à fournir sur la période 2020-2025. Une option irréaliste pour les pays riches, a fortiori en période de resserrement budgétaire.
Surtout que cette option ne prévoit aucun élargissement de la liste des contributeurs à des pays comme la Chine, Singapour ou le Qatar.
La deuxième option résume le point de vue des pays riches: l'objectif financier serait "une augmentation de la finance mondiale pour l'action climatique" à "X" milliers de milliards de dollars par an "d'ici 2035".
Mais cet objectif inclurait "toutes les sources de finances", dont l'argent public de chaque pays du monde, des fonds privés ou encore des taxes mondiales nouvelles, par exemple sur l'aviation ou le transport maritime.
"Ce nouveau texte présente les deux extrémités de chaque camp sans laisser beaucoup de place au compromis", a commenté Li Shuo, expert du cercle de réflexion Asia Society Policy Institute.
L'initiative revient désormais à la présidence azerbaïdjanaise de la conférence. Il faudra qu'elle trouve le bon d'équilibre pour soumettre aux près de 200 pays de la COP un texte acceptable, et qui permette à chacun de rentrer chez soi "avec un niveau égal de mécontentement", selon les mots à l'AFP du négociateur en chef azerbaïdjanais, Ialtchine Rafiev.
(B.Smith--TAG)