Macron conclut sa visite à Mayotte avec une réunion de crise
Emmanuel Macron doit conclure vendredi sa visite à Mayotte, dévastée par le cyclone Chido, par une réunion de crise pour dicter au gouvernement les "actions utiles" après avoir été confronté depuis la veille à la détresse d'habitants partagés entre exaspération et accablement.
Vendredi matin, le chef de l'Etat s'est d'abord rendu dans des localités éloignées de Mamoudzou, le chef-lieu du département le plus pauvre de France, où les secours, l'eau, l'électricité et la nourriture tardent à arriver.
A Tsingoni, commune enclavée de l'ouest de Grande-Terre, l'île principale de l'archipel de l'océan Indien, il a été interpellé sur les pénuries. "On veut de l'eau, de l'eau", l'ont imploré des habitants.
"On a envoyé la force militaire pour déblayer les routes", "tout va être distribué", a assuré le président, reconnaissant qu'il fallait "mieux informer" car l'absence d'information "crée de l'angoisse". Pour le rétablissement des lignes téléphoniques, "ça va prendre du temps", mais "on va mettre des systèmes satellitaires", a-t-il promis.
A 12H30 locales (10H30 à Paris), il devait présider en visioconférence depuis Mayotte la cellule interministérielle de crise, pour "conclure son déplacement et transmettre au gouvernement et aux administrations les actions utiles à prendre", a annoncé l'Elysée.
Jeudi, lors d'une première journée intense et parfois tendue sur ces îles ravagées le 14 décembre par le cyclone le plus violent depuis 90 ans, Emmanuel Macron a pu constater l'étendue des dégâts et l'ampleur de la détresse.
"J'ai décidé de dormir ici parce que je considérais que compte tenu de ce que vit la population", repartir le jour-même aurait pu "installer l'idée qu'on vient, on regarde, on s'en va", a-t-il expliqué dans la soirée à la presse. "C'est une marque de respect, de considération", a-t-il assuré.
- "Dans la merde" -
Le président de la République a été confronté pendant de longues heures à l'impatience, la colère et le désespoir de Mahorais qui ont souvent tout perdu.
"Macron démission !", "tu racontes des salades", "de l'eau, de l'eau, de l'eau", lui ont lancé jeudi soir des jeunes et des mères de famille. N'arrivant pas à détailler les mesures égrenées au fil de la journée, Emmanuel Macron a fini par lâcher: "C'est pas moi le cyclone ! Je ne suis pas responsable !".
"N'opposez pas les gens! Si vous opposez les gens on est foutu, parce que vous êtes contents d'être en France. Parce que si c'était pas la France vous seriez 10.000 fois plus dans la merde!", s'est époumoné le président au milieu de la foule qui criait. "Il n'y a pas un endroit de l'océan Indien où on aide autant les gens."
Ces propos ont fait vivement réagir à gauche et à l'extrême droite. "Attitude arrogante et donneuse de leçons", a estimé la député écologiste Sandrine Rousseau. "A travers ce genre d'expression", les Mahorais "ont toujours le sentiment d'être traités à part", a ajouté le vice-président du Rassemblement national Sébastien Chenu.
Selon des chiffres provisoires, 31 morts et quelque 2.500 blessés ont été officiellement recensés. "Il est vraisemblable qu’il y ait beaucoup plus de victimes", a reconnu Emmanuel Macron, rappelant qu'une mission avait été diligentée pour vérifier le nombre de morts.
Une centaine d'évacuations sanitaires ont également été effectuées depuis le 16 décembre, selon le ministère de l'Intérieur.
Au Mozambique le cyclone Chibo qui a frappé dimanche ce pays africain a fait au moins 73 morts.
- Reconstruction en "deux ans"? -
Environ un tiers de la population de Mayotte, soit plus de 100.000 habitants, notamment les personnes en situation irrégulière venant des Comores voisines, vivent dans des logements précaires.
"Mettre fin" aux bidonvilles et "supprimer" ces habitats "indignes" et "dangereux", c'est l'un des objectifs de la "loi spéciale" promise par le président pour "rebâtir" Mayotte. Le Premier ministre François Bayrou a fixé un délai potentiel de deux ans pour cette reconstruction.
A moyen terme, le président a aussi dit vouloir "renforcer la lutte contre l'immigration clandestine" en augmentant, jusqu'à presque doubler, le nombre de reconduites à la frontière, qui était de 22.000 en 2023.
Emmanuel Macron a fixé à lundi 23 décembre la journée de "deuil national" en solidarité avec Mayotte, avec drapeaux en berne et minute de silence partout en France à la mi-journée.
Vendredi soir, après cette visite intense de deux jours, le président de la République est attendu à Djibouti pour partager le traditionnel repas de Noël avec les troupes françaises déployés à l'étranger.
(O.Robinson--TAG)