Psychiatrie: il y a urgence à répondre à la crise, selon le Comité d'éthique
Conditions d'accès dégradées, pénurie de moyens, inégalités territoriales: "l'urgence et la gravité" de la crise de la psychiatrie en France nécessitent un "plan" dédié, rapide et d'ampleur, souligne le Comité national d'éthique dans un avis rendu public lundi.
Cet avis, intitulé "Enjeux éthiques relatifs à la crise de la psychiatrie: une alerte", insiste sur l'urgence d'une réponse coordonnée et ambitieuse alors que les troubles psychiatriques touchent environ un Français sur cinq au cours de sa vie.
Trois priorités sont énoncées par le comité: "garantir un accès à des soins psychiatriques dignes" et renforcer "la vigilance autour de la santé mentale de tous"; "lutter contre la stigmatisation et l'exclusion des personnes vivant avec des troubles psychiatriques"; renforcer la formation et la recherche dans toutes les disciplines concourant à la prise en charge psychiatrique.
"Les populations en détresse ont besoin de réponses rapides et effectives; tout comme les professionnels de santé, fatigués et inquiets", souligne le Comité consultatif national d'éthique (CCNE), qui s'est auto-saisi du sujet.
S'il "accueille avec satisfaction" le choix de la santé mentale comme grande cause nationale 2025 par les gouvernements Barnier puis Bayrou, l'organisme, qui mêle médecins, scientifiques, juristes et philosophes, préconise "un véritable plan psychiatrie" pluriannuel.
"Depuis une dizaine d'années, plus d'une vingtaine de rapports ont dénoncé les difficultés de prise en charge, d'accès aux soins, parfois les maltraitances, notamment de la contention - liées pour beaucoup à des manques de personnel. Et le paradoxe est l'absence de réponse politique forte", a résumé devant la presse Sophie Crozier, neurologue hospitalière et corapporteure de l'avis.
Autre corapporteure, la psychiatre Angèle Consoli a notamment relevé "la très grande pénurie de moyens", notant entre autres qu'à l'hôpital, "en 40 ans, on a fermé 60% des lits" pour un virage ambulatoire non compensé par d'autres accueils.
"Quand on a besoin d'une place en hospitalisation, il y a des listes d'attente, les troubles s'aggravent, ça finit aux urgences... ou des mineurs se retrouvent parfois dans des services de psychiatrie adulte", a-t-elle pointé.
Pour le CCNE, "c'est une question de moyens, mais pas seulement. C'est aussi la vision des autres disciplines sur la psychiatrie et les malades, et la vision de la société qui doit changer, comme cela a été le cas pour les malades du cancer", a souligné son président, Jean-François Delfraissy.
(C.Young--TAG)