Budget: nouvelle motion de censure LFI dans un climat tendu avec le RN
Pour clore l'examen en première lecture du budget de l'Etat 2023, l'Assemblée nationale examine vendredi une nouvelle motion de censure des Insoumis contre le gouvernement dans une ambiance à couteaux tirés avec les députés RN après un lourd incident en séance jeudi.
Le très probable rejet de la motion, examinée à partir de 15H30, vaudra adoption en première lecture de l'ensemble du projet de loi de finances. Le Sénat doit s'en saisir à compter du jeudi 17 novembre.
Oppositions et camp présidentiel se seront renvoyé tout au long d'un mois de débat la responsabilité du "blocage" et de l'absence de compromis.
Cette fois seuls à déposer une motion de censure, les Insoumis répondent à l'arme constitutionnelle du 49.3 dégainée mercredi par la Première ministre Élisabeth Borne pour la quatrième fois en quinze jours, afin de faire passer sans vote les budgets de la Sécu puis de l'Etat, faute de majorité absolue à l'Assemblée.
Le groupe RN, qui a choisi de ne pas déposer cette fois sa propre motion, a prévu d'apporter ses voix à la motion LFI.
Les votes des alliés de gauche PS, PCF et EELV, qui divergent sur la stratégie à adopter face à la série de 49.3, seront scrutés de près.
Une vingtaine de députés de gauche n'avaient pas voté la précédente motion LFI, dont le patron du Parti communiste Fabien Roussel, la socialiste Valérie Rabault ou l'écologiste Delphine Batho.
- Sanction réclamée -
Mais avant ces débats sous haute tension, le bureau de l'Assemblée nationale, sa plus haute instance collégiale, doit décider de la possible sanction d'un député RN après un incident d'une ampleur rare survenu jeudi avec un élu LFI.
Dans une ambiance houleuse, la titulaire du perchoir Yaël Braun-Pivet a mis fin prématurément à la séance, "compte tenu de la gravité des faits" et de "l'émotion légitime" de l'Assemblée - de telles interruptions de séance sont rarissimes.
Soutenu par son groupe, le député RN de Gironde affirme qu'il parlait d'un "bateau" de migrants mentionné dans la question, et pas de M. Martens Bilongo, natif et élu du Val-d'Oise.
Mais l'indignation a été générale, jusqu'à Emmanuel Macron, "heurté par ces mots qui dans l'hémicycle comme hors de l'hémicycle sont intolérables", selon son entourage.
La présidente du groupe RN, Marine Le Pen, a dénoncé de son côté une "polémique grossière" des "adversaires" du RN.
Selon une source parlementaire, le député concerné est passible d'une "censure simple", soit la privation pendant un mois de la moitié de l'indemnité parlementaire, ou d'une "censure avec exclusion temporaire", c'est-à-dire la privation pendant deux mois de la moitié de l'indemnité allouée au député avec interdiction de prendre part aux travaux de l’Assemblée et de reparaître au Palais Bourbon pendant quinze jours.
Le groupe macroniste Renaissance a indiqué qu'il "ne siègera pas" tant qu'une sanction lourde n'aura pas été prise. Le parti présidentiel a même demandé la démission "sans délai" du député.
- "Opposition frontale" au RN -
Un rassemblement en soutien à M. Martens Bilongo est organisé par LFI aux abords du Palais Bourbon à 13H00.
C'est l'occasion pour la Nupes de se ressouder. Le vote RN à deux reprises déjà en faveur d'une motion de censure de la Nupes puis d'une motion LFI avait provoqué un malaise dans les rangs de la coalition de gauche et de vives critiques du camp présidentiel quant à une "collusion" avec l'extrême droite.
Le groupe LFI emmené par Mathilde Panot a pris soin cette fois de préciser dans sa motion que "notre projet et notre vision de la société nous placent en opposition frontale avec l'extrême droite".
"On ne se sent pas visé par le terme +extrême droite+", dit-on au sein du groupe RN, où il est toujours prévu de voter la motion LFI, même après l'incident de jeudi.
La censure sera défendue à la tribune vendredi après-midi par le député LFI de La Réunion Jean-Hugues Ratenon. Les Insoumis accusent l'exécutif de "mépriser les ultramarins" en ne reprenant pas l'ensemble des augmentations de crédits votées par les députés, souvent contre l'avis du gouvernement.
(G.Gruner--BBZ)