Les bureaux de vote ont fermé, les Brésiliens retiennent leur souffle
Les bureaux de vote ont fermé dimanche à 17H00 locales (20H00 GMT) et le Brésil retient son souffle dans l'attente du nom du vainqueur : le président sortant d'extrême droite Jair Bolsonaro, ou l'ex-président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva, le favori.
Une polémique est venue entacher une journée qui s'est déroulée sans incident majeur.
Le président du Tribunal supérieur électoral (TSE) Alexandre de Moraes a annoncé la levée de barrages filtrants de la police routière fédérale (PRF) qui ont "retardé l'arrivée des électeurs" aux bureaux de vote, la gauche criant au scandale.
M. de Moraes a cependant affirmé en conférence de presse que, malgré les retards, "aucun autocar n'a rebroussé chemin et tous les électeurs ont pu voter".
Le président Bolsonaro, 67 ans, parmi les premiers à avoir voté dès l'ouverture des bureaux dans le quartier Vila militar de Rio de Janeiro, est arrivé en milieu d'après-midi à Brasilia au palais de l'Alvorada où il devait attendre les résultats.
Au moins 200 personnes ont commencé à se rassembler dans le centre de Brasila, sur l'Esplanade des ministères, après la fermeture des bureaux, a constaté l'AFP.
Vêtu d'un t-shirt avec l'inscription "Brésil" jaune et vert, aux couleurs du drapeau national affectionné par ses supporters, Bolsonaro s'était auparavant affiché aux côtés de l'équipe de football de Flamengo, qui a remporté samedi en Equateur la Copa Libertadores, l'équivalent de la Ligue des champions européenne.
Lula, 77 ans, devait attendre les résultats à Sao Paulo où les célébrations ont été prévues en cas de victoire. Chemise blanche à manches longues, il avait dit sa "confiance dans une victoire de la démocratie" en votant à Sao Bernardo do Campo, la ville du sud-est où il a fait ses débuts en tant que dirigeant syndical.
Lula a souhaité "restaurer la paix entre les Brésiliens", à l'issue d'une campagne ultra-polarisée qui a coupé le pays en deux.
- Accepter la défaite -
La campagne entre ces deux hommes que tout oppose s'est déroulée dans un climat brutal qui les a vus s'insulter copieusement pendant que les réseaux sociaux, unique source d'information de la majorité des 170 millions d'utilisateurs brésiliens, charriaient des torrents de désinformation.
Bolsonaro a insulté Lula: "voleur", "ex-prisonnier", "alcoolique" ou "honte nationale". Ce dernier a rendu les coups: "pédophile", "cannibale", "génocidaire" ou "petit dictateur".
Dimanche, en Amazonie, les indigènes de l'ethnie Sateré-Mawé, de la communauté Sahu-Apé, ont dessiné sur leurs joues des flèches rouge et noire avant de se rendre à pied dans le bureau de vote le plus proche de leurs maisons de bois.
Ces dessins signifient qu'ils ont un objectif à atteindre : faire élire leur candidat, Lula, celui qui "sait ce que c'est que de lutter au quotidien" et "combien c'est difficile (...) pour nous".
Le nom du nouveau président devrait être officialisé avant 20H00 locales (23H00 GMT). Les premières estimations devraient être favorables au candidat Bolsonaro avec le dépouillement en premier des Etats du Sud du pays, avant ceux du Nord, soutiens de Lula.
Si les sondages prédisent depuis des mois une victoire de Lula, Bolsonaro a encore des raisons d'y croire.
Selon l'ultime enquête Datafolha samedi soir, l'écart s'est resserré à 52%/48% pour Lula avec une marge d'erreur de 2 points. Les sondages avaient lourdement sous-estimé le score de Bolsonaro au 1er tour (43% contre 48% pour Lula).
L'abstention pourrait être la clé du résultat. L'enjeu majeur de l'entre-deux tours a été la chasse aux 32 millions d'abstentionnistes, alors que six millions de voix séparaient Lula (48%) de son Bolsonaro (43%).
L'autre question qui taraudait les observateurs était de savoir si, en cas de défaite, Bolsonaro accepterait le verdict des urnes, en devenant le premier président se présentant à un second mandat à ne pas être réélu depuis le retour à la démocratie en 1985.
Après avoir lancé des attaques incessantes contre le système "frauduleux" des urnes électroniques, il a affirmé vendredi, sans convaincre: "celui qui a le plus de voix gagne. C'est la démocratie".
Lula, ancien métallo au destin hors norme, qui a connu la disgrâce de la prison (2018-2019) puis l'annulation de ses condamnations pour corruption, a dit espérer que Bolsonaro "reconnaîtra le résultat" s'il perd.
Douze gouverneurs d'Etats brésiliens seront également élus dimanche soir, et le résultat dans l'Etat de Sao Paulo, le plus peuplé et le plus riche, est très attendu.
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(T.Renner--BBZ)