49.3: "fin de règne" selon les oppositions versus refus du "blocage" pour la majorité
Refus de "l'enlisement" d'un côté, accusations de "passage en force" de l'autre: les débats autour des motions de censure Nupes et RN contre le gouvernement ont donné lieu lundi à une nouvelle confrontation d'arguments entre groupes politiques à l'Assemblée nationale.
- La majorité défend sa "cohérence"
La cheffe de file des députés Renaissance, Aurore Bergé, a rejeté en bloc les accusations d'un "passage en force" avec le 49.3.
Après des débats "de près de 60 heures en hémicycle" sur le premier volet du budget, le camp présidentiel a choisi "le refus du blocage et de l'enlisement pour donner un budget à la France", a-t-elle fait valoir.
Les oppositions doivent dire si elles sont prêtes à "une grande coalition" allant de "l'extrême gauche" à l'"extrême droite", a-t-elle lancé ou, sinon, "admettre l'évidence", celle d'alliances "contre-nature" avec pour seul but de "faire tomber le gouvernement".
Tout en admettant des débats "qualitatifs" sur le budget, le président des députés Horizons, Laurent Marcangeli, a déploré de son côté que des "partis dits de gouvernement", "qui auraient pu nous surprendre agréablement", n'aient pas joué le jeu du compromis, visant notamment sans le nommer le PS.
Son homologue du MoDem, Jean-Paul Mattei, a quant à lui souligné les "longs débats" qui ont pu se tenir à l'Assemblée avant le couperet du 49.3.
Mais il a aussi remis sur le tapis l'amendement sur les "super dividendes" proposé par son groupe, rejeté par l'exécutif, alors qu'il "n'avait pas pour but de chambouler" la ligne présidentielle mais de "dire que, dans un contexte particulier, on peut changer temporairement quelques règles".
- La Nupes vise "macronarchie" et "inaction" climatique
La présidente du groupe écologiste, Cyrielle Chatelain, a accusé Elisabeth Borne "d'inaction" climatique avec "zéro propositions radicales": "votre planification est une mascarade" et le budget "un blanc-seing" donné aux plus riches.
Le communiste André Chassaigne a pour sa part reproché au gouvernement sa "voix chevrotante et timide pour suggérer au Medef d'augmenter les salaires". Le patron des députés PCF a souligné ne pas voter la motion de censure du RN, "porteuse d'un projet d'extrême droite mortifère".
La présidente du groupe LFI, Mathilde Panot, a dénoncé les "magouilles en coulisses" du gouvernement pour "évacuer" des amendements sur les "super dividendes", ou refuser la taxation des "superprofits" et le rétablissement de l'ISF. "L'Assemblée nationale n'est pas la photocopieuse de l'exécutif", a lancé l'insoumise.
Elle a aussi pointé "fait du prince" et "macronarchie" avec le 49.3, la "manœuvre favorite des autoritaires".
"Vous ne vouliez pas d'un autre texte que le vôtre", a aussi estimé le socialiste Boris Vallaud, avec le "refus obstiné" du gouvernement de retenir des mesures votées par l'Assemblée comme le crédit d'impôt pour les résidents en Ehpad.
Cyrielle Chatelain comme Mathilde Panot ont dénoncé une ambiance de "fin de règne", un terme également utilisé par Marine Le Pen, au RN.
- Le RN "ne craint pas la dissolution"
Marine Le Pen s'était ménagé un effet de surprise: après avoir dit l'inverse ces derniers jours, la patronne du groupe d'extrême droite a annoncé dans l'hémicycle voter également pour la motion de censure de gauche, trouvant "acceptable" le texte de la Nupes.
"Je le dis, pour que personne même en haut lieu ne se méprenne: au RN, nous ne craignons pas les menaces de dissolution", a-t-elle lancé dans une allusion à une menace brandie par Emmanuel Macron.
"Si demain nous devons repartir aux élections, nous y sommes prêts", a-t-elle fait valoir.
Marine Le Pen s'est aussi alarmée de la "crise sociale" et du "déluge migratoire".
- LR dénonce le "rapprochement des extrêmes"
"Faudrait-il faire tomber ce gouvernement car il y aurait dans cette assemblée une autre majorité possible?", a fait mine de s'interroger le patron des députés LR, Olivier Marleix, doutant que "le rapprochement des extrêmes à l'œuvre" aille "jusqu'à nous proposer un gouvernement en commun".
Et "donner encore davantage de notre pays l'image d'un bateau à la dérive n'est pas dans l'intention des Républicains", a-t-il dit. "Ces motions de censure, personne n'y croit donc vraiment, pas même ceux qui les ont déposées. Mais nous n'hésiterons pas à en déposer une nous-mêmes si les circonstances l'exigent", a-t-il prévenu.
- LIOT refuse le "chaos" d'une censure
"Le recours à l'article 49.3 constitue toujours un échec politique" et "affaiblit le gouvernement qui y recourt", a souligné Charles de Courson pour le groupe LIOT (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires).
Mais "nous avons fait le choix de ne soutenir ni l'une ni l'autre" des motions, "en responsabilité". Il s'agit de "ne pas ajouter du chaos à l'instabilité" et de poursuivre les débats budgétaires.
(A.Lehmann--BBZ)