Carburants: négociations laborieuses chez TotalEnergies, appel général à la grève
Pour l'instant, pas de percée: les négociations entre syndicats et direction sur les salaires ont débuté dans la nuit de jeudi à vendredi au siège de TotalEnergies, au 17e jour d'une grève qui a réussi à créer la pagaille dans les stations-service et enflé en un appel à une grande journée de grève nationale, des transports aux fonctionnaires, mardi prochain.
Le ton n'était pas optimiste, peu avant minuit, quand un négociateur de la CGT visiblement en colère, Thierry Defresne, a annoncé après trois heures et demie de réunion que la dernière proposition de la direction, 6,5% d'augmentation des salaires contre 6% proposé initialement, était "très loin du compte, très loin de propositions qui serait de nature à faire lever le conflit en cours."
"Demain on va avoir une situation insurrectionnelle dans les raffineries si on n'est pas capable de conclure un accord ce soir", a-t-il prévenu.
Dans les Hauts-de-France, en Ile-de-France et dans le Centre-Val-de-Loire, particulièrement touchés par les pénuries créées par les grèves dans les raffineries et dépôts de carburants, les automobilistes ont continué jeudi leur quête d'essence et de diesel, chassant les ravitaillements de camions-citernes et surveillant les applications. Une pénurie qui fait perdre un temps considérable aux professionnels qui dépendent de leur véhicule: transporteurs routiers, artisans, ambulanciers...
"Depuis quatre-cinq jours, c'est la catastrophe", s'exclame Françoise Ernst, monitrice d'auto-école à Paris. "On ne peut plus travailler."
Les routiers sont "sur le fil du rasoir", dit à l'AFP le secrétaire général de l'organisation professionnelle Otre, Jean-Marc Rivera.
"J'ai des contrats où je dois sortir les poubelles, où je dois honorer des services de prestations de ménage. Et quand on n'a pas d'essence et qu'on a une très grosse tournée, c'est un peu compliqué", raconte Elisabeth Mailhes, auto-entrepreneuse dans le nettoyage, qui n'est pas payée si elle n'honore pas ses contrats.
Seule une raffinerie a vu la grève s'arrêter jeudi, celle de Fos-sur-Mer appartenant à Esso-ExxonMobil, groupe où un accord a été trouvé avec certains syndicats mais pas la CGT. Les grévistes de celle de Gravenchon-Port-Jérôme l'ont en revanche reconduite.
Cinq raffineries, sur sept en France, restent à l'arrêt, ainsi que plusieurs dépôts dont un immense près de Dunkerque, appartenant à TotalEnergies.
- Grève générale mardi -
A 17H00 jeudi, 29,1% des stations manquaient d'un ou plusieurs carburants, selon le ministère de la Transition énergétique, à peine moins que la veille (30,8%). Dans le Centre Val-de-Loire, la proportion monte à 44,7%.
L'ouverture des négociations, les premières depuis le début de la grève, intervient alors que le climat social s'est tendu après les réquisitions gouvernementales de salariés dans la raffinerie Esso-ExxonMobil de Gravenchon en Normandie, et au dépôt de Flandres de TotalEnergies à Mardyck, près de Dunkerque, pour rouvrir les vannes.
Ces réquisitions ont "mis le feu aux poudres", selon le patron de la CGT, Philippe Martinez, sur BFMTV, et une grande grève aura lieu en France mardi prochain, dans de multiples secteurs et chez les fonctionnaires: quatre grands syndicats (CGT, FO, Solidaires, FSU) et plusieurs organisations de jeunesse ont appelé à une journée de mobilisation et de manifestations interprofessionnelles.
La SNCF et la RATP seront notamment touchées par la grève, ce qui s'ajoute à un mouvement existant dans des centrales nucléaires.
- "Troubles à l'ordre public" -
Sur le terrain, les premiers salariés réquisitionnés, forcés de travailler sous peine de sanctions pénales, ont permis de libérer de premiers stocks de carburants par oléoduc (7.000 mètres cubes du dépôt de Gravenchon en Normandie en 24 heures, selon le gouvernement) et par la route (25 camions-citernes de Dunkerque jeudi), sans encombre.
La préfecture du Nord a fait valoir que les réquisitions avaient été décidées en raison de "troubles à l'ordre public" dans les stations-essence, où la longueur des files d'attente, jusqu'à deux kilomètres, a entraîné des frictions, et empêche des professions prioritaires d'accéder aux pompes.
Pour accélérer la reprise, le gouvernement a de nouveau autorisé les camions-citernes à rouler ce week-end, alors que les poids lourds ont normalement interdiction de rouler du samedi 22H au dimanche 22H.
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(A.Berg--BBZ)