Les magasins de jouets se lancent sur le marché de l'occasion
Des jouets d'occasion vendus aux côtés de jouets neufs: les magasins spécialisés commencent à faire une place dans leurs rayons aux figurines, jeux de société et puzzles de seconde main, jusqu'alors cantonnés aux sites de revente en ligne entre particuliers.
"Outre l'inflation, il y a une prise de conscience écoresponsable chez les consommateurs mais aussi dans la filière, car on ne peut pas dire que l'univers du jouet soit très bon élève en la matière, il y a beaucoup de plastique", souligne Patrick Jocteur Monrozier, directeur du pôle clients de King Jouets.
"On a ouvert le premier magasin King Okaz en mai et six autres ont suivi. On développait déjà des gammes de jouets éco-responsables, on a une offre de 1.500 pièces détachées, manquait cette brique de la seconde main", indique M. Jocteur Monrozier, en arpentant le magasin pilote de Saint-Marcel-lès-Valence.
Ce nouveau concept lancé par l'enseigne, qui compte 330 points de vente dans en France, propose un tiers de jouets d'occasion pour deux tiers de jouets neufs, un jeu de société de seconde main pouvant ainsi être proposé deux fois moins cher juste à côté de son équivalent sous cellophane.
"On reprend un jouet à un tiers de son prix neuf, payé sous forme de bon d'achat, et on revend aux alentours de 50% du prix neuf, après nettoyage et reconditionnement si besoin, et avec une garantie d'un an. Certaines catégories, comme les doudous, ne sont pas reprises", précise à l'AFP M. Jocteur Monrozier.
Derrière le comptoir de ce premier King Okaz, Loïc Navarro est en pleine expertise: "on récupère les puzzles jusqu'à 60 pièces seulement, car il faut les assembler devant la personne qui les ramène pour voir s'il ne manque pas une pièce! Et pour les Lego, le mieux c'est de les amener montés pour prouver qu'ils sont complets, et derrière on les démonte...", s'amuse-t-il.
Claire Levier, 37 ans, a ramené des jouets que ses enfants "n'utilisent plus". "J'ai l'habitude d'acheter et vendre sur Vinted ou LeBonCoin, mais venir en magasin c'est beaucoup plus simple, je n'ai pas à envoyer des colis. Et les prix de l'occasion sont intéressants aussi, par les temps qui courent", dit-elle.
- Un jouet d'occasion pour Noël ? -
Preuve que le jouet de seconde main s'ancre dans les habitudes de consommation, "54% des Français en ont déjà acheté un au cours des 12 derniers mois", indique Frédérique Tutt, analyste monde pour NPD, cabinet qui fait référence pour le marché du jouet et qui a réalisé une étude fin juin auprès de 1.022 personnes.
"C'est une vraie tendance qui est en train de rentrer dans les moeurs. Il y a un dernier cap à passer, est-ce qu'on offrira de l'occasion à Noël?", renchérit Catherine de Bleeker, directrice générale d'Oxybul Eveil et Jeux.
Cette enseigne, qui organisait deux fois par an des "trocs" de jouets et livres, installe en ce mois d'octobre des corners permanents de seconde main au coeur de ses 25 magasins.
"Depuis l'appli IDTroc, on prend la photo du produit, on fixe son prix, on imprime un code barre puis on le dépose en magasin. L'équipe contrôle son bon état avant la mise en rayon, le montant sera ensuite crédité en carte cadeau. Et on vend beaucoup plus que si on dépose sur une plateforme", affirme Mme De Bleeker.
JouéClub proposera également début 2023 une opération de revente "sous forme événementielle", baptisée Troc O'Joué" dans ses 290 magasins, après deux tests "très satisfaisants" en 2021 et 2022.
Certaines boutiques indépendantes proposent déjà depuis des années un rayon occasions, comme Sous le Préau, dans le 9e arrondissement de Paris, où Mélusine De Moulins a installé plusieurs étagères avec des jeux, livres, rollers et même une petite cuisine pour enfant.
"J'ai besoin que mon métier soit aussi un peu social, c'est un désir de partage, pour des parents avec un peu moins d'argent, ou des nounous qui veulent faire des cadeaux moins chers", résume-t-elle, précisant qu'un tiers du prix de vente sera reversé à une association.
(A.Lehmann--BBZ)