Retraites : l'exécutif décidera cette semaine de la méthode
Ira ? Ira pas ? L'exécutif décidera "d'ici la fin de la semaine" s'il inclut ou non la réforme des retraites dans ses textes budgétaires, présentés lundi en Conseil des ministres et dont l'examen au Parlement s'annonce houleux.
La réforme peut être menée dès l'automne via un amendement gouvernemental au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), qui est présenté dans la matinée en Conseil des ministres, ou au premier semestre 2023 via un projet de loi spécifique.
"Avec le président de la République, on décidera d'ici la fin de la semaine", a déclaré la cheffe du gouvernement sur BFMTV et RMC.
Les deux têtes de l'exécutif réuniront au préalable mercredi soir les chefs de la majorité, a précisé un cadre du camp présidentiel.
François Bayrou, l'allié Modem d'Emmanuel Macron, est vent debout contre un "passage en force" via le PLFSS. "On n'est pas aux pièces", martèle-t-il. L'ex-Premier ministre Edouard Philippe exhorte lui surtout à aller vite, peu importe la méthode.
Syndicats et oppositions sont pour leur part braqués contre une réforme éclair, y compris LR, qui juge pourtant indispensable de réformer les retraites.
"On risque de casser le corps social", a prévenu le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger sur Europe 1, en promettant un automne social chaud en cas de recours au PLFSS.
"C'est une décision difficile", nous "cherchons la meilleure voie", a admis Elisabeth Borne.
- Oui au compromis, non au blocage -
Après un début de quinquennat heurté, avec la perte de la majorité absolue à l’Assemblée, le chef de l'Etat, déterminé à continuer à se poser en réformateur, multiplie les chantiers sur l'emploi, l'environnement, l'immigration ou la fin de vie.
L'exécutif accélère ainsi lundi avec la présentation du PLFSS mais aussi du projet de budget 2023, dont l'examen s'annonce difficile à l'Assemblée, ainsi que d'un projet de loi sur les énergies renouvelables qu'Emmanuel Macron entend développer "deux fois plus vite".
Le gouvernement veut réduire les délais d'enquêtes publiques et de recours, en particulier pour les éoliennes en mer, et voir fleurir les panneaux solaires sur les parkings, les bords d’autoroutes et les terres agricoles.
Sur les retraites comme sur le budget, la Première ministre a assuré qu'elle pousserait pour "la recherche de compromis", sans pour autant exclure le recours à l'article 49.3 de la Constitution, qui permet l'adoption d'un texte sans vote, sauf motion de censure.
"Ma méthode c'est le dialogue, la recherche de compromis. En même temps, les Français ne comprendraient pas qu'on soit bloqués", a-t-elle affirmé.
Le PLF sera "un budget de protection", fait valoir de son côté le ministre des Comptes publics Gabriel Attal, mettant en avant notamment "le bouclier tarifaire" pour limiter à 15% la hausse des factures de gaz et d'électricité.
De quoi mieux limiter que dans d'autres pays européens l'explosion des prix due en partie à la guerre en Ukraine. Mais cela ne devrait pas suffire pour trouver des alliés sur les bancs de l'opposition.
- Alerte sur les déficits -
Quant au budget de la Sécurité sociale, le gouvernement, dans son projet de loi de financement consulté par l'AFP, table sur un déficit ramené à 6,8 milliards d'euros, en nette amélioration par rapport à 2022. Mais avec un déficit de la branche vieillesse repartant à la hausse, rendant indispensable, selon le gouvernement, d'allonger la durée du travail.
Outre les retraites, plusieurs points du budget promettent des discussions animées au Parlement.
La Nupes et le RN font notamment pression en faveur d'une taxe sur les "superprofits", face à une majorité divisée sur la question.
Les collectivités, confrontées à des factures énergétiques qui explosent, seront un autre "point très chaud" des débats, selon le rapporteur général du Budget Jean-René Cazeneuve.
En plus du PLF et du PLFSS, le gouvernement doit aussi présenter lundi son projet de loi de programmation des finances publiques pour le quinquennat.
Dans un avis rendu dimanche, le Haut Conseil de finances publiques a jugé "peu ambitieuse" et "particulièrement fragile" la trajectoire envisagée pour ramener le déficit de 5% à 2,9% d'ici 2027. Et la prévision de croissance de 1% du gouvernement pour 2023 paraît "un peu élevée".
(K.Lüdke--BBZ)