Wall Street chute, affolée par l'obstination de l'inflation
La Bourse de New York a terminé en forte baisse mardi, sur un marché catastrophé par un indicateur d'inflation américain plus élevé que prévu, qui a douché l'optimisme des derniers jours et laisse présager d'un resserrement monétaire encore plus brutal que prévu.
Le Dow Jones a chuté de 3,94%, l'indice Nasdaq, de 5,16%, et l'indice élargi S&P 500 de 4,32%. C'est la plus mauvaise séance du Nasdaq depuis mi-juin.
"C'était une journée de dingue", a commenté Greg Bassuk, d'AXS Investments.
Les indices ont été précipités dans le rouge par la publication de l'indice de prix CPI qui a révélé une légère hausse de 0,1% des prix en août, contre une baisse de 0,1% attendue par les économistes. Sur un an, l'inflation ralentit à 8,3%, mais moins que les 8,0% anticipés par le marché.
"Les marchés ont été secoués par ce mauvais CPI et ont répondu en conséquence", a expliqué Cliff Hodge, de Cornerstone Wealth.
Pour Edward Moya, d'Oanda, les investisseurs craignent "d'avoir été trop optimistes en prévoyant la fin du cycle de resserrement monétaire de la Fed" (banque centrale américaine).
"Le marché voit l'inflation aller dans le mauvais sens, ce qui forcerait la Fed à maintenir sa posture offensive, voire même à aller encore plus loin", a observé Quincy Krosby, de LPL Financial.
Les opérateurs vont désormais jusqu'à attribuer une probabilité de 34% à une hausse d'un point de pourcentage du taux directeur de la Fed lors de sa prochaine réunion, les 21 et 22 septembre, et non plus de 0,75 point, une hypothèse que nul n'envisageait jusqu'à aujourd'hui.
"Le marché s'inquiète à l'idée que la Fed ne nous entraîne dans une récession ou ne grippe le système en le privant de liquidité", a relevé Quincy Krosby.
En outre, les opérateurs ont vu dans le rapport de mardi des signes que l'inflation était ancrée dans l'économie américaine, notamment les prix de l'alimentation.
"Le problème c'est de savoir à quel point ces prix élevés vont peser sur l'économie réelle et les consommateurs", a estimé Greg Bassuk, au point d'écraser la demande, qui sera aussi pénalisée par le durcissement des conditions de crédit et de financement.
Le spectre d'une Fed à la main encore plus lourde a dopé les taux obligataires. Le rendement des emprunts d'Etat américains à 10 ans est monté à 3,41%, contre 3,35% la veille.
Le taux à 2 ans, plus représentatif des attentes du marché en matière de politique monétaire, s'est lui envolé jusqu'à 3,78%, pour la première fois depuis près de 15 ans (novembre 2007).
La perspective d'un marché du crédit plus onéreux a torpillé les valeurs technologiques, qui doivent le plus souvent emprunter pour financer leur croissance.
Les géants du Nasdaq ont tous souffert, en particulier Apple (-5,87%), Amazon (-7,06%), Alphabet (-5,86%) ou Meta (-9,37%), descendu mardi à son plus bas niveau depuis les premiers jours de la pandémie de coronavirus, en mars 2020.
Tous les membres du Dow Jones ont fini en baisse, aucun secteur ne parvenant à surnager.
Parmi les quelques rares à s'en sortir, Twitter (+0,80% à 41,74 dollars), salué après le vote favorable, en assemblée générale extraordinaire, des actionaires en faveur du rachat par Elon Musk, que l'entrepreneur a depuis dénoncé.
Autre valeur à tirer son épingle du jeu, le spécialiste du gaz naturel liquéfié (GNL) Cheniere (+3,07% à 165,67 dollars), plus important exportateur de GNL américain, qui profite à plein de la flambée du marché du gaz et a relevé ses prévisions pour l'ensemble de son exercice.
Le spécialiste des vélos d'appartement et tapis de course connectés Peloton a dérapé (-10,32% à 9,91 dollars) après l'annonce du départ de son cofondateur John Foley, qui quitte son poste de président exécutif. Il avait déjà renoncé à celui de directeur général, en février.
(S.G.Stein--BBZ)