Le CNR lancé, Macron laisse la "porte ouverte" aux sceptiques
"Les absents ont toujours tort", mais la porte reste "ouverte": Emmanuel Macron a donné jeudi le coup d'envoi du Conseil national de la refondation (CNR) destiné à réformer la France mais boycotté par les oppositions et une partie des syndicats, en annonçant que les citoyens y seraient associés par une consultation en ligne.
"Nous sommes dans une situation historique", avec les défis climatique, énergétique et la guerre en Ukraine, a martelé le chef de l'Etat devant la presse avant d'ouvrir la séance inaugurale du CNR en présence d'une quarantaine de représentants des élus, du patronat, de syndicats et d'associations, et d'une dizaine de ministres.
Cette nouvelle méthode de gouvernance, annoncée par le président avant les législatives en juin et voulue comme un outil de "renouveau démocratique", est très contestée et tous les partis d'opposition ont choisi de la boycotter.
"Les absents ont toujours tort", a répliqué Emmanuel Macron, en notant que 12 représentants des "forces vives de la Nation", sur les 52 invités, n'étaient pas au rendez-vous. Mais la "porte sera toujours ouverte", a-t-il assuré, affichant sa volonté de "rebâtir du consensus".
De l'extrême droite à l'extrême gauche, les oppositions voient avant tout dans le CNR un moyen pour le président de contourner le Parlement, où son camp n'a plus de majorité absolue, pour reprendre la main dans le débat public.
- "Référendums" -
En présentant les contours de la réunion, Emmanuel Macron n'a pas exclu que des propositions issues des débats du CNR puissent "déboucher sur des référendums".
Cinq grands thèmes ont été retenus dans les échanges à venir dans les prochains mois : le plein emploi, l’école, la santé, le "bien vieillir" et la transition écologique.
Une "consultation nationale très large" des Français sera aussi proposée en ligne "dès la semaine prochaine", a-t-il annoncé. Un site dédié au CNR doit aussi être lancé dans la soirée, a précisé l'Elysée.
Le CNR a débuté ses travaux loin des yeux du public, à huis clos, certains participants n'ayant pas souhaité une diffusion des débats, selon l'Elysée. "La clé (était) d'installer la confiance", a fait valoir Emmanuel Macron.
Le président du Sénat, Gérard Larcher (LR), a refusé de venir, estimant que "la démocratie représentative" c'est le Parlement, et qu'il existe déjà un "forum de la société civile" avec le Conseil économique, social et environnemental (Cese).
Côté majorité, l'ex-Premier ministre Edouard Philippe, retenu par un congrès au Québec, était le grand absent mais s'est fait représenter.
Seuls trois syndicats ont répondu présents: la CFDT, la CFTC et l'Unsa.
- "Inégalités" -
Après un propos introductif du président, les participants ont présenté leurs attentes et priorités.
"Monsieur le président, ma question est simple, on en fait quoi" des 102 propositions de l'Assemblée des départements de France ? a demandé son président François Sauvadet (UDI), en alertant sur des départements dont "les dépenses sociales explosent" et dont les "plans d’investissements (sont) à la baisse", selon son discours devant le CNR obtenu par l'AFP.
Présent au CNR et joint par l'AFP, Noam Leandri, président du collectif Alerte, qui rassemble les grandes associations françaises de lutte contre la pauvreté et l’exclusion, a regretté que le thème des "inégalités" n'ait pas été abordé en soi, et que la méthode reste "floue".
Le président de la Cour des comptes Pierre Moscovici a de nouveau appelé au désendettement pour "préparer l'avenir", en prônant des "marges d'efficience" côté santé et une "meilleure qualité de la dépense" dans l’éducation.
Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, s'est dit à son arrivée être dans une logique de "propositions" mais désireux de "savoir si c'est une démarche loyale" ou pas.
Le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, a appelé à "donner sa chance au produit".
Guy Geoffroy, vice-président de l'Association des maires de France (AMF) sera lui "très vigilant sur le point d'arrivée de la démarche engagée".
Dans l'après-midi, la Première ministre Élisabeth Borne devait présider une réunion pour déterminer les chantiers et établir leur mise en œuvre dans la durée.
(L.Kaufmann--BBZ)