"Stop aux imports de miel à bas prix": des apiculteurs français lancent un cri d'alarme
Une petite centaine d'apiculteurs français, estimant être étranglés par les importations de miel à bas prix, se sont mobilisés jeudi place de la République à Paris pour alerter sur leur situation et demander des aides d'urgence, a constaté une journaliste de l'AFP.
Certains sont venus en combinaisons, d'autres avec leur enfumoir; des pancartes réclamaient une "juste rémunération".
"La vraie difficulté, c'est de commercialiser nos produits", a expliqué lors d'un point presse Manuel Roger, un des apiculteurs à l'origine de la mobilisation.
Il produit 60 à 70 tonnes de miel par an sur son exploitation dans l'Indre et, habituellement, a écoulé les trois quarts de sa production à cette époque. Cette année, "j'en ai vendu cinq tonnes pour l'instant", a-t-il dit. "Les stocks des négociants sont pleins, le miel ne se vend pas."
Les importations sont donc nécessaires.
Mais "c'est la première fois qu'on a autant de miel sur les fermes qu'on n'arrive pas à vendre", a remarqué Laurence Marandola, porte-parole de la Confédération paysanne, troisième syndicat agricole français, lors du même point presse.
La production française de miel, très variable, a été particulièrement bonne ces deux dernières années. Selon une estimation d'organisations professionnelles, elle s'élève à 33.900 tonnes en 2023, après 30.600 tonnes en 2022.
De leur côté, "les importations continuent à des prix scandaleux, à moins de deux euros le kilo, en particulier en provenance d'Europe de l'Est", a déploré Mme Marandola.
Pourtant dans les rayons, le prix du miel n'a pas baissé pour les consommateurs français, a-t-elle ajouté, en dénonçant des "surmarges" dans la filière, chez les négociants ou distributeurs.
Les apiculteurs mobilisés demandent notamment une aide d'urgence forfaitaire à la trésorerie, estimée à environ 50 millions d'euros, ainsi que la mise en place d'un prix minimum d'entrée sur le territoire ne pouvant être inférieur au prix de revient en France.
Une délégation a été reçue au ministère de l'Agriculture.
"Nous avons réussi à leur faire prendre conscience de (la) nature (de la crise) comme de son ampleur", indique la Confédération dans un communiqué. Un prochain rendez-vous est prévu dans trois semaines.
Contacté par l'AFP, David Besacier, président du Syndicat français des miels, qui regroupe les entreprises conditionnant du miel en pot, renvoie à l'inflation, "qui incite les ménages à se tourner vers des produits moins chers que le miel" ou "vers du miel pas cher".
Entre des ventes en baisse et l'importante récolte des deux dernières années, y compris par les apiculteurs amateurs, "nos stocks sont pleins et par ricochet, on n'achète pas le miel aux producteurs français", a reconnu M. Besacier.
"On essaie de valoriser au maximum les miels de France", a-t-il assuré. Mais "les importations sont indispensables" pour fournir tous les amateurs, y compris ceux qui souhaitent des prix bas ne pouvant venir que de l'étranger, ajoute-t-il.
Un argument qui ne convainc pas Manuel Roger.
"un pot de miel, ça a un coût, c'est dur, c'est un travail compliqué et technique, y compris pour nos collègues en Europe de l'Est", a-t-il souligné. "Si on doit brader notre miel, on ne pourra pas tenir."
(J.Torres--TAG)