Maldives: Solih, président sortant battu
Le président sortant des Maldives, Ibrahim Mohamed Solih, propulsé à la présidence par défaut, les candidats potentiels ayant été condamnés à des peines de prison ou étant partis en exil, a reconnu sa défaite face à son adversaire pro-chinois à la présidentielle samedi.
Au second tour, son adversaire Mohamed Muizzu a recueilli 54% des voix.
Né le 1er mars 1962, M. Solih a été élu député pour la première fois en 1994, mais n'avait jamais occupé de haute fonction avant sa victoire surprise à la présidence en 2018.
Mohamed Nasheed, dirigeant en exil du Parti démocratique maldivien (MDP), n'ayant pas été autorisé à se présenter, ce militant pour le climat mondialement reconnu a choisi de cornaquer M. Solih, son suppléant, pour la présidentielle de samedi.
Ce dernier a ainsi succédé à Abdulla Yameen (2013-2018), interrompant la dérive autocratique qui isolait l'archipel de ses alliés traditionnels.
La libération des prisonniers politiques au début de son mandat avait fait naître l'espoir qu'il poursuivrait les réformes libérales dans un pays qui n'a introduit la démocratie multipartite qu'en 2008.
M. Solih a annulé la condamnation de M. Nasheed et celle de plusieurs autres hommes politiques considérés comme des menaces potentielles par son prédécesseur M. Yameen, qui purge actuellement une peine de 11 ans de prison pour corruption et blanchiment.
L'ex-homme fort des Maldives n'a pas été autorisé à se présenter à la présidentielle. Son parti, le Parti progressiste des Maldives (PPM) soutient l'actuel maire de Malé et ancien ministre du Logement, Mohamed Muizzu, âgé de 45 ans.
- Brouille avec son mentor -
Mais M. Solih s'est brouillé avec son mentor quand il a décidé de gouverner comme bon lui semblait, opposant son veto aux réformes politiques voulues par M. Nasheed qui lui auraient accordé des pouvoirs au Parlement.
Après que M. Nasheed, eut été blessé dans un attentat à la moto piégée en 2021 imputé aux extrémistes islamistes, ses partisans ont accusé M. Solih de ne pas en faire assez pour appréhender les responsables.
Les tensions ont atteint leur paroxysme en janvier pour l'investiture du MDP, que M. Solih a remportée. Son ancien mentor l'a accusé d'avoir truqué le scrutin, puis a quitté le parti.
Depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement de M. Solih a été accusé d'étouffer la dissidence et de restreindre le droit de la presse, notamment avec une loi promulguée l'an dernier qui oblige les journalistes et les médias à nommer leurs sources.
"L'espace de liberté des médias aux Maldives s'est fortement détérioré", a dénoncé Human Rights Watch (HRW) en mai.
- Relation avec l'Inde -
Durant son mandat, M. Yameen a emprunté massivement à la Chine pour des projets de construction, transformant l'archipel, haut lieu du tourisme de luxe et destination privilégiée des célébrités et riches personnalités du monde entier, en foyer de rivalité géopolitique.
L'administration de M. Solih a dénoncé le piège de la dette que constituent les prêts accordés par Pékin et s'est efforcée de rétablir la position diplomatique traditionnelle des Maldives.
Sous son impulsion, les Maldives ont réintégré le Commonwealth, un bloc que M. Yameen avait quitté, en raison de risques de sanctions liées à la détérioration de la situation des droits humains au cours de son mandat.
Le Premier ministre indien Narendra Modi a été invité à l'investiture de M. Solih, les Maldives renouant ainsi avec New Delhi en dépit des vieilles inquiétudes concernant la puissance politique et économique considérable de l'Inde dans l'archipel.
Le parti de M. Yameen et ses partisans ont régulièrement organisé des manifestations exigeant une réduction de l'influence de l'Inde dans le pays à majorité musulmane.
(G.Gruner--BBZ)